Fausse pierres possible à la machine à projeter?

Bonjour à tous et en particulier au créateur de ce site que je félicite pour son sens du partage
moi-même façadier professionnel, cette technique que je croyais disparue me semble vraiment super!!
J'ai bien compris la méthode de création, par contre j'ai une question:
J'ai recement vu une pub d'un gars qui fait de la fausse pierre dans le sud, il dit dans celle-ci
appliquer le mortier à l'aide d'une machine à projeter, quelqu'un à t'il l'idée de savoir comment il obtient
le nuançage de ses pierres, ça semble pas évident....
je vous donne son site pour info, il fait aussi des truc que je trouve très sympa: 3 w les belles pierres fr
Merci d'avance pour vos réponses éclairées
pascal

bonjour et bienvenue^^
çà fait longtemps que j'ai pris connaissance de l'existence de machines à projeter, à vrai dire, depuis mes débuts (mon premier boulot en maçonnerie était manoeuvre-serveur de compresseur à gamelle) et çà n'a pas été sans m'interpeller, vu que tous mes concurrents d'alors ont opté pour cette technique, avec laquelle on peut faire un travail de qualité raisonnable si on est 3 (1 qui fait la matière, 1 qui projette, 1 qui finit)... Finalement, tous ou presque ont abandonné devant la difficulté de réaliser de grandes façades sans défaut, la difficulté étant la réalisation de la matière) et les nouvelles machines dans lesquelles on met un mortier déjà prêt et facile ont ruiné les espérances de la gamelle (le problème étant que maintenant, le mortier est plus proche d'une matière plastique que d'un mortier de chaux...)
Dans la vidéo dont tu parles, je pense qu'il s'agit de Mr Garnieri, effectivement, j'admire moi-même l'abnégation de cet artisan-artiste mais je pense que l'usage d'un compresseur est inutile, voire nuisible, car: l'opération principale est de faire un mortier à faible teneur en eau (çà passe mal même à la gamelle); l'essentiel est de se concentrer sur le travail, qui est relativement lent et finalement indissociable du geste de l'ouvrier...
D'autres entreprises comme Décopierre gerbent le mortier à la machine, jettent sur l'enduit quelques colorants et dessinent des joints avec le doigt...Moi, je pense que c'est aux antipodes de la création, mes pierres sont dessinées, peintes et sculptées une par une et le pire, c'est que j'arrive à livrer mon travail moins cher, ce qui ne m'incite pas à travailler avec le bruit d'une machine alors qu'un bon transistor réglé sur de la musique la remplace avantageusement (voir même le silence)!

Tiens, c'est une réalisation Décopierre qui m'a donné l'envie de m'intéresser à cette technique .......


Je me permet de m'immiscer dans votre conversation pour justement poser une question sur la technique dont vous discutez.
Si ce n'est pas avec une machine à projeter, est-ce que Christian peut nous dire comment il réalise les parties unies dans certaines de ces 'oeuvres' ?
Parce que moi, je suis tombé amoureux des maisons dans ce genre-là :



L'uni est-il donc juste un enduit taloché ?

Il s'agit d'un crépi gratté, quand je suis devenu manoeuvre en maçonnerie, en 1979, mon patron avait un compresseur et une gamelle et on ne faisait que des finitions projetées, il se trouve que depuis la crise de 1973, les clients étaient devenus plus exigeant, avant, ils devaient attendre 4 ans le maçon, qui venait lui faire un enduit bâtard taloché gris et çà ne se discutait pas... Après, le maçon était obligé d'écouter le client qui voulait quelque chose de joli, tant qu'à faire! Dans ces années là, un peu tout a été essayé, j'ai eu quelques hésitations entre le projeté-écrasé et le gratté et je suis tombé amoureux du gratté parce que çà me semblait comme une peau de pêche ^^ et qu'intellectuellement, je pense que c'est ce qu'il y a de plus proche d'un mortier ancien, qui était réalisé taloché en chaux naturelle de pays, blanche à l'origine mais qui s'oxydait au fur et à mesure des années et prenait une teinte moyenne que je pense avoir assez bien reproduite dans ma recette... J'ai expliqué quelque part sur le site le phénomène de micro-érosion qui faisait éclater la surface lisse du talochage et le gratté est la technique qui reproduit le mieux la beauté qui se dégage des vieux crépis (avant 1914)... Depuis, je n'ai fait que du crépi gratté malgré l'infinité de choses qu'on peut réaliser avec de la chaux colorée, quoique mon expérience me permettrait sans doute de réaliser quelques autres belles tentatives!
Le crépi gratté est en même temps facile et très dur à réaliser:
1 il faut que la matière soit toujours parfaitement faite (pas de grumeaux, la couleur exactement pareille d'une bétonnière à l'autre (quand on réalise un gratté, c'est toujours moi qui fait les bétonnières)
2 humidifier la surface et le mortier de façon à ce que jamais on ne revienne sur un raccord qui a commencé à sécher, il ne faut jamais s'arrêter et toujours revenir le plus vite possible rajouter une couche sur le raccord humide (je fais toujours une diagonale, çà évite de voir apparaître des rectangles comme on voit sur de nombreuses façades car les mecs font une partie d'échafaudage, puis une autre etc...),
3 toujours du sable grossier (0.4 ou 0.5), le plus épais possible (=1.5 cm, soit maximum 2.4 fois maximum la taille du grain de sable une fois gratté); il est important que la surface ne soit pas unie (si on prend du sable fin), le défaut (les gros trous) donne du volume au crépi, on ne réalise pas de la peinture, c'est ce qui donne le fameux velouté
4 je ne dresse jamais à la règle
5 j'essaye d'associer systématiquement un bas de mur en pierres (au vieillissement, si on fait une couleur unie jusqu'au sol, il y aura toujours des projections de boue qui feront paraître le bas dégueulasse, de plus au bout de quelques dizaines d'années, il n'y aura que le bas à resuivre) et les angles en pierre évidemment (si le client refuse, en principe, je ne ferai pas le travail)!
BON, j'arrête là, j'en parlerais longtemps, bien entendu, il y a une sous couche dessous dans ce cas, c'était des parpaings bruts.

On sent vraiment la passion qui se dégage de tes propos !
Et l'envie de faire partager l'amour du travail bien fait.
Moi-même Maître-Artisan (pas dans la maçonnerie ... dans la pâtisserie, c'est pas tout à fait pareil ! ), ça me touche !
Ca me donne encore plus envie d'essayer cela de mes propres mains.